ANATOLE

 

Le Messie est également représenté par un astre levant. Ainsi, dans l’Ancien Testament : " Un astre issu de Jacob devient chef " (Nb 24,17) " Mais pour vous qui craignez mon Nom, le soleil de justice brillera, avec la guérison sous ses ailes " (Ml 3,20) " Par les matrices du secours de notre Elohîm, il nous visitera, soleil levant venu d’en haut, pour apparaître à ceux qui gisent dans la ténèbre et l’ombre de la mort " (Lc 1,78-79).

 

En Grec, anatolè, astre levant, provient du verbe anatelo, anatelein qui signifie " se lever " en parlant d’un astre. C’est l’astre qui apporte sa lumière en se levant.

Mais ce mot grec désigne aussi une plante qui croît, qui pousse.

Dans le contexte du Benedictus (Lc 1,78-79), c’est un astre qui germe, qui se lève dans les entrailles de Marie. De même, et dans ces quelques mots se situe la clef du christianisme, cet astre doit germer et se lever en nous : " Ainsi nous tenons plus ferme la parole prophétique : vous faites bien de la regarder, comme une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu'à ce que le jour commence à poindre et que l’astre du matin se lève dans vos coeurs. " (2 P 1,19). 

Si cette phrase demeure mystérieuse tant que nous n’en avons pas fait l’expérience, l’Apocalypse confirme que Jésus est cet astre lumineux : " Moi, Jésus, j’ai envoyé mon Ange publier chez vous ces révélations concernant les Eglises. Je suis le rejeton de la race de David, l’Etoile radieuse du matin " (Ap 22,16). Paul confirme l’objectif : " En effet le Dieu qui a dit : Que des ténèbres resplendissent la lumière, est Celui qui a resplendi dans nos cœurs... " (2 Co 4,6).

 

Syméon le Nouveau Théologien commente cette expérience : " Examinons bien si l’astre levant a illuminé notre cœur ou si nous sommes toujours dans les ténèbres de l’ignorance. Luttons pour accroître ce feu divin en nous. ". Dans la personne du chrétien, c’est le Christ lui-même qui vit et agit. Syméon décrit la désolation de ceux qui ne possèdent pas le Christ en eux et qui sont habités par les rêves illusoires de ce bas-monde : " Voyons donc, frères, examinons-nous exactement et instruisons-nous de l’état de nos âmes. Le sceau est-il bien en nous ? Reconnaissons si le Christ est en nous aux marques que nous avons dites. Ecoutez, je vous prie, frères chrétiens, réveillez-vous et observez si la lumière a illuminé vos cœurs. Si vous avez contemplé la grande lumière de la connaissance, si l’astre levant vous a visité venu d’en haut, se manifestant à nous qui étions assis dans les ténèbres de la mort. Et rendons gloire et actions de grâce ininterrompues à la bonté du maître qui nous a fait ce don et luttons pour nourrir et accroître en nous-mêmes par la pratique des commandements le feu divin grâce auquel la lumière divine prend toujours plus d’éclat et de force. "

Dans ses Hymnes, il témoigne que cet astre levant est né dans son cœur, en lui-même : " Ce feu se lève en moi, au-dedans de mon pauvre cœur, tel le soleil ou tel le disque solaire. Il se montre sphérique, lumineux, oui, tel une flamme. Je ne sais, je le répète, ce que je puis en dire, et je voulais me taire si seulement j’avais pu. Mais la merveille redoutable fait bondir mon cœur et ouvre ma bouche, ma bouche souillée, et malgré moi, me fait parler et écrire. " Il dénonce à la fois ceux qui croient posséder cette expérience et ceux qui nient qu’elle soit possible ici-bas : " Toi qui t’es levé à l’instant dans mon cœur enténébré, toi qui m’as montré des merveilles que mes yeux n’avaient point vues, toi qui es descendu jusqu’en moi comme dans le dernier de tous, toi qui m’avais fait disciple et fils d’un apôtre, moi que le terrible dragon homicide retenait auparavant comme ouvrier et instrument de toute iniquité, toi le soleil d’avant tous les siècles qui a brillé dans les enfers, et qui a ensuite éclairé mon âme plongée dans les ténèbres et m’a fait don d’un jour sans déclin, ô la chose difficile à croire pour les lâches et les paresseux de mon espèce, toi qui a comblé de tous les biens la misère qui m’habitait, toi-même, donne-moi une voix, fournis-moi des paroles pour raconter à tous tes oeuvres stupéfiantes et ce que tu opères encore aujourd’hui en nous tes serviteurs ; afin que ceux qui dorment dans les ténèbres de la négligence et ceux qui disent impossible aux pêcheurs de se sauver et de trouver miséricorde comme Pierre et les autres apôtres, saints, bienheureux et justes ; afin que ceux-là, ceux qui disent cela connaissent et apprennent que, pour une bonté telle que la tienne, cela était facile et l’est encore et le sera ; et ceux qui croient te posséder, toi, la lumière du monde entier et qui disent ne pas te voir, ne pas être dans la lumière, ne pas être éclairés, ne pas te contempler sans cesse ô Sauveur, qu’ils apprennent que tu n’as pas éclairé leurs pensées ni abrité dans leur cœur souillé et qu’ils ont tort de se réjouir pour de vaines espérances en s’imaginant voir ta lumière après leur mort. Non, c’est dès ici-bas que les arrhes, c’est ici même que le sceau, toi Sauveur tu les donnes aux brebis placées à ta droite. Si pour chacun en effet la mort ferme la porte, si après le trépas pour tous pareillement il n’y a plus rien à faire, et si nul ne saurait plus agir bien ou mal, ô mon Sauveur alors tel chacun sera trouvé tel il restera. "

Ailleurs, Syméon décrit le processus d’engendrement du Christ intérieur ou du corps de gloire : " Faisons comparaître devant vous le bienheureux Paul qui dit : " Mes petits enfants pour qui j’éprouve de nouveau les douleurs de l’enfantement, jusqu'à ce que le Christ soit formé en vous " (Ga 4,19). Où donc, d’après lui, en quel lieu et partie du corps se forme le Christ ? Sur le front, pensez-vous, ou bien sur le visage ou sur la poitrine ? Non, certes, mais à l’intérieur, dans notre cœur... De même que la femme connaît clairement quand elle est enceinte, que l’enfant remue dans son sein, et qu’elle ne saurait ignorer qu’elle le porte en elle, de même celui qui a le Christ formé en lui-même connaît ses mouvements, autrement dit ses illuminations, n’ignore pas le moins du monde ses tressaillements, autrement dit ses éclairs, et se rend compte de sa formation en lui. "

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